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Rennescraft : la vie des hauts ludiques*

Le 17 mars 2014 - Par qui vous parle de , , , , , dans parmi lesquels

Quand @el_Reg nous a parlé de personnes qui modélisaient la ville de Rennes via Minecraft, notre coeur a fait boomboom (on parle de ce jeu merveilleux ici ou ).  On s’est donc tourné vers les porteurs du projet Rennescraft pour en savoir plus sur cette hybridation entre cartographie et nouveaux imaginaires vidéoludiques. Thomas François et Kevin Fegar, de l’association 3HitCombo, nous racontent alors leur belle aventure rennaise.

Pouvez-vous nous présenter le dispositif Rennescraft et ses objectifs ?

Le projet de départ était une proposition d’animation sur 4 jours lors d’un événement organisé par la Ville de Rennes, notamment par son service innovation numérique, ainsi que la région Bretagne.

« Le bâtiment que vous voyez n’est autre que  Les Champs Libres et son planétarium (transformé en serre) »

Nous avions déjà pu tester les potentiels du jeu Minecraft en ateliers, mais cette fois-ci l’idée était de pouvoir apporter aux joueurs un point de vue associé à la ville de Rennes. Donc transposer la ville, ou en tout cas ses  « grandes lignes », sur une carte Minecraft. Cela a très vite intéressé la ville, notamment le service information et géographie de Rennes (SIG) qui nous a aidé à porter les bases de la carte de Rennes dans le jeu (topographie et emprise des bâtiments). Nous avons donc présenté le projet durant Connexités en juin 2013 et aujourd’hui le projet suit son cours,  mobilisant de plus en plus de participants dont la grande majorité a moins de 16 ans.

Quels sont les moyens mobilisés sur ce projet ?Quel est le business model ?

Pour l’heure la ville nous accompagne financièrement, par le biais du service innovation numérique, pour nous permettre d’héberger la carte et aussi d’accueillir des joueurs en ligne (il faut savoir que Minecraft est assez gourmand en ressources serveur). Côté humain une bonne partie de nos contributeurs/constructeurs sont des bénévoles, comme beaucoup de personnes chez 3 Hit Combo. Nous avons mis en place un système de « white-list » qui permet d’inscrire les personnes volontaires dans la construction de la ville et permet aussi il faut le dire de filtrer les demandes, incitant les participants à se responsabiliser.

Concernant les acteurs impliqués, de quelle manière la ville de Rennes a-t-elle participé au projet ? Quelles sont les attentes de la ville vis-à-vis de ce projet ?

Comme je l’ai dis ce projet à fortement motivé certains services de la ville notamment le SIG, mais également le service d’aménagement et d’urbanisme de Rennes Métropole.

La ville de Rennes et Rennes Métropole étant aussi dans un principe d’open data, nous avons pu facilement récupérer certaines données. On peut dire que la ville voit en ce projet un autre moyen d’établir un contact avec les habitants de la ville, surtout le jeune public. Minecraft est surtout un jeu, et c’est un jeu que les 10-14 ans connaissent bien. Donc cela facilite l’échange. D’autant que le public est réceptif et que la communauté s’agrandit de jour en jour.

De quelle manière sont impliqués les citadins rennais (voire autres) ? Quelles sont leurs attentes vis-à-vis du projet ? Comment l’utilisent-ils ? Avez-vous des anecdotes à partager sur certains usages ?

L’implication se fait progressivement via la liste blanche que nous avons lancée et qui permet de s’inscrire dans un projet efficace. Lors des 4 jours d’animation, le public de passage a pu se poser sur les postes de jeux, se promener et poser sa pierre à l’édifice. Nous avions également invité une partie de la communauté Minecraft à participer à l’événement. Il a connu un certain succès auprès d’un public qui n’est pas forcément Rennais. Je me souviens de ce participant belge qui s’est attaqué à la reproduction de la place Hoche… via Google Maps et la fonction street view !

A quel point votre dispositif modélise-t-il la ville de Rennes de façon précise ? Sur quels critères avez-vous effectué cette modélisation ? Avez-vous travaillé avec des experts de la ville ? Si non, est-ce une perspective qui vous semble intéressante / nécessaire pour l’avancement du projet ?

Le biais de Minecraft impose une certaine norme puisque les blocs virtuels sont tous de la même dimension. Il n’y a pas véritablement de soucis d’échelle qui s’est imposé à nous. Certains participants ont essayé de reproduire les différents quartiers et monuments de la ville de manière la plus fidèle possible, via différentes textures disponibles dans le jeu et en ayant comme contrainte matérielle le simple fait de disposer des cubes virtuels.

Nous avons collaboré avec le Service d’Information Géographique de Rennes pour disposer d’une vision précise de la topographie de la ville. Mais Rennescraft c’est aussi la possibilité de ne pas être très fidèle à la réalité, de repenser certains bâtiments. Certains sont très ressemblants, d’autres sont complètement ré imaginés. Nous n’avons pas vraiment de cadre normatif qui briderait l’imagination des joueurs. Mais Rennescraft c’est aussi respecter certaines règles qui font avancer  le projet. C’est également un moyen de repenser et d’imaginer les infrastructures qui font la ville : les axes de circulation, le mobilier urbain, les aménagements de l’espace public.

D’un point de vue prospectif, quel regard portez-vous sur le tandem « ville et jeu vidéo » ? Pensez-vous que les deux secteurs puissent avoir un avenir commun et transdisciplinaire ? Si oui, de quelles manières ?

Chez 3 Hit Combo nous pensons qu’effectivement ce genre de proposition peut être un vecteur de socialisation et de participation à un projet commun. L’application est ici de penser la ville de Rennes car nous voulions rassembler des gens du territoire autour de notre leitmotiv. Nous sommes une association qui tente par certains moyens de détourner l’usage « loisir » des jeux-vidéos pour proposer des alternatives. C’est en ce sens que Rennescraft s’inscrit. Quelque part, nous n’avons pas forcément énormément détourné l’usage du jeu en lui-même, puisqu’il s’agit quelque part d’un jeu de construction, mais nous voulions l’exploiter au maximum dans une perspective de projet ludique, collaboratif et créatif. En plus, Minecraft est pour nous un outil idéal pour mettre en lien un territoire et sa population car très « plastique ». Oui ce tandem fonctionne et la transdisciplinarité existe, Rennescraft en est une preuve.

* »Vie des hauts ludiques » : expression inspirée de la rubrique éponyme tenue par Prof Pirou dans (feu) IG Magazine, revue spécialisée dans les jeux vidéo

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