15 avril 2014
Par
qui vous parle de

L'observatoireArticles

[Concours] Six mots pour écrire la sci-fi : la flash-fiction comme outil prospectif ?

Le 15 avril 2014 - Par qui vous parle de dans

Connaissez-vous les « six-word novels » et plus généralement la « flash fiction », en français « micronouvelle », ces histoires tenant en à peine quelques mots ? La plus connue d’entre elles est attribuée à Ernest Hemingway (à tort, semble-t-il), et résume parfaitement les contours de ce difficile exercice :

For sale: baby shoes, never worn.
[A vendre: chaussure bébé, jamais portées.]

En six mots, l’auteur réussit ainsi à construire une histoire particulièrement dramatique, en seulement six petits mots. Dans la même idée, on pensera aux haïkus, ces poèmes nippons qui expriment une émotion en 17 syllabes seulement, et bien évidemment à l’OuLiPo (Ouvroir de Littérature Potentielle), consistant à (se) jouer des contraintes pour produire une oeuvre littéraire inédite.

Par sa concision, l’exercice a logiquement séduit de nombreux auteurs, professionnels ou amateurs. Il connaît d’ailleurs, depuis quelques années, un véritable regain d’intérêt aux Etats-Unis, notamment depuis la publication de la série d’ouvrage « Six-Word Memoirs » compilant ces superbes littéraires. Et c’est tout naturellement, ou presque, que nous proposons d’appliquer la contrainte à la prospective urbaine. Chiche ?

Mais rendons d’abord à César ce qui lui appartient. On s’inspire ici du magazine Wired qui, en écho à la sortie de Six Word Memoirs, avait invité de nombreux auteurs à se frotter à l’exercice – parmi lesquels plusieurs écrivains de science-fiction, réalisateurs et scénaristes, auteurs et dessinateurs de comics…

Les contributions les plus intéressantes tournent souvent autour de sujets futuristes, dont plusieurs tournent autour de nos sujets de prédilection, au point parfois de rattraper la réalité. Exemple avec celle de Stan Lee, qui résonne sans le vouloir avec le choix de certains constructeurs automobile de « couper » les moteurs de leurs voitures électriques en location.

Automobile warranty expires. So does engine.
[La garantie de la voiture expire. De même que le moteur.]

Plus récemment, le magazine de culture geek io9 (dont on vous recommande INSTAMMENT la lecture) a fait appel à sa communauté de lecteurs/contributeurs pour imaginer des six-word novels spécialement dédiés à la SF (ici, et ). Le résultat est particulièrement enthousiasmant.

Si la majorité des contributions tourne logiquement autour de sujets SF classiques (l’exploration spatiale, les voyages à remonter le temps, etc.), certaines s’avèrent particulièrement intéressantes pour nourrir nos imaginaires urbains – en particulier dans la compréhension de la ville numérique. En voici une petite sélection, évidemment non exhaustive.

Sur l’essor (possible) des monnaies virtuelles :

SALE – White bread – $4,500 (Bitcoin only)
[A vendre : pain blanc – 4,500$ (bitcoins seulement)]

Sur la toute-puissance mnémonique de Google :

Google’s been retrieved. It knows everything.
[Google a été récupéré. Il sait tout.]

Sur la délégation de nos mémoires à la technologie numérique :

« Upload complete, » my second consciousness said.
[« Téléchargment terminé », annonça ma deuxième conscience]

Enfin, celui-ci qui résume parfaitement notre conception du rétrofuturisme:

Grandma, what was the future like?
[Grand-mère, à quoi ressemblait le futur ?]

Et notre favori, qui résume parfaitement les paradoxes de l’intelligence artificielle à travers l’exemple Siri, l’interface vocale des terminaux Apple :

Siri, call home. « No, » she replied.
[Siri, appelle  la maison. « Non », a-t-elle répondu.]

Ces exemples s’inscrivent ainsi dans notre quête, sans cesse réinventée, de trouver des formats susceptibles de nourrir nos imaginaires urbains. A l’instar du design-fiction (consistant à « matérialiser » des objets et interfaces futuristes) et de son homologue le design-friction (la même chose, en version plus corrosive), la « flash-fiction » peut servir de support à la réinvention de ces réflexions prospectives. Sa concision oblige en effet à aller à l’essentiel : une histoire, une idée.

Comme vous le voyez, les exemples choisis sur Wired ou io9 peuvent être vus comme des miroirs de nos appréhensions contemporaines par rapport aux technologies. Malheureusement pour nous, on y trouve finalement assez peu de contributions portant plus spécifiquement sur les sujets urbains, si ce n’est celui-ci – poétiquement dramatique -, recensé par Wired :

From torched skyscrapers, men grew wings. – Gregory Maguire
[Depuis les gratte-ciels incendiés, les hommes ont vu pousser leurs ailes.]

C’est pourquoi nous proposons aujourd’hui un petit jeu, vous invitant à partager vos micronouvelles portant sur la ville de demain. Le format « six mots » étant plus propice à la version anglaise, on vous autorise à aller jusque dix mots. Les sujets sont évidemment libres, du moment qu’ils viennent éclairer ou nourrir les imaginaires urbains que vous avez dans la tête…  N’hésitez d’ailleurs pas à commenter vos flash-fictions si vous en sentez le besoin (par des liens, des anecdotes, etc.)

Pas d’autres contraintes que cela, l’exercice étant déjà suffisamment ardu comme ça ! Pour récompenser le ou la gagnant.e,  on a prévu un petit cadeau, évidemment : une sélection de quelques ouvrages emblématiques de science-fiction ayant contribué à nourrir nos imaginaires urbains (à piocher ici, par exemple). On vous laisse jusqu’au 15 mai pour partager vos inspirations dans les commentaires ? A vous de jouer !

52 commentaires

Laisser un commentaire