5 juin 2013
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Extension du domaine de la pub : IBM à l’assaut de la ville agile

Le 5 juin 2013 - Par qui vous parle de , , , , dans parmi lesquels

On connaissait JCDecaux et son modèle économique iconoclaste, consistant à offrir aux collectivités un mobilier urbain pouvant accueillir de la publicité. Il faudra maintenant compter avec IBM feat. Ogilvy, auteur d’une superbe variante : la publicité qui sert aussi de mobilier urbain… Youplaboum !

Créé pour promouvoir le concours People 4 Smarter City, le concept se décline donc en trois exemples aussi simples qu’efficaces : un banc public, un abri anti-pluie, et une rampe d’accès pour escaliers. Bref, du mobilier urbain répondant à quelques besoins primaires des citadins nomades ; d’autant plus utile que les collectivités rechignent à investir pour de tels dispositifs, pourtant peu coûteux (cf. La ville en marches).

Ce faisant, IBM effectue un joli glissement vers les préceptes de ce que nous appelons « ville agile » :

  • des innovations peu coûteuses car légères et low-tech, directement inspirées par l’essor du hacking urbain ; 
  • si possible pluri-fonctionnelles, de manière à maximiser leur efficacité ; 
  • et répondant aux besoins les plus basiques des citadins plongés dans les affres de la ville en mouvement

Une évolution qui peut sembler étonnante quand on connaît l’appétence d’IBM pour l’ultra-technologique, mais finalement assez naturelle dans le contexte socio-économique actuel (comme l’avait montré Aude Castan dans son mémoire consacré à la (ré)appropriation de la ville intelligente par les marques)

Au vu de ces quelques critères, on ne devrait que s’enthousiasmer pour ce concept d’IBM/Ogilvy. Sauf que nous sommes d’humeur rabat-joie, et qu’il nous semble nécessaire de poser ici les questions qui fâchent. En premier lieu : où va donc s’arrêter cette colonisation publicitaire de nos villes ? Certes, le marketing in situ a de nombreuses vertus (cf. Blâme et éloge du colonialisme publicitaire) Mais il faut savoir raison garder : faire d’un support publicitaire un mobilier à part entière, nous semble une nouvelle frontière qu’on aimerait ne pas voir franchie… tout en sachant qu’elle le sera inévitablement et que ce n’est qu’une question d’années, voire de mois, sauf à revoir la législation de la publicité urbaine.

En second lieu se pose la question des gouvernances, plus épineuse encore. Car on ne peut pas véritablement reprocher à IBM et Ogilvy de faire leur métier, à savoir communiquer de manière innovante et qui plus est, astucieuse. Le problème vient ici du déficit d’infrastructures urbaines, et la responsabilité en incombe directement aux collectivités territoriales. Les marques ne font ici que remplir le vide laissé par les pouvoirs publics. N’y a-t-il pas là matière à débattre de ce qu’on souhaite faire de nos villes ? Félicitons donc IBM et Ogilvy pour partager leur créativité en termes de mobilier urbain, mais surtout de nous alerter sur les dérives d’un monde dans lequel on peine à se sentir bien.

Sur un sujet connexe, voire aussi : Vendre le temps de transit disponible : à quel prix ?

NB : titre emprunté à ce brillant article de Jean-Marc Manach pour Internet Actu

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